Fluides frigorigènes
Quels critères pour bien choisir un Fluide frigorigène ?

Le choix d’un fluide frigorigène est une décision complexe. Elle dépend de nombreux facteurs, que nous allons tenter de lister ici. Mais il n’y a pas de recette miracle. Deux entreprises différentes, qui travaillent sur le même produit et dans le même contexte, choisiront peut-être deux fluides différents. Sans qu’une décision soit bonne et l’autre mauvaise. Bref, ça s’étudie.

Les critères environnementaux :

Les fluides frigorigènes sont susceptibles de se retrouver dans l’atmosphère, que ce soit à cause de fuites, d’opération de maintenance, ou lors de la fin de vie de l’appareil. Même si on cherche à les minimer, le « zéro fuite » n’est pas atteignable. Il est donc important d’identifier l’impact de la molécule elle-même sur l’environnement.

 

bien choisir un Fluide frigorigène

Liés à l’effet de serre :

PRG (Pouvoir de Réchauffement Global), ou PRP (Pouvoir de Réchauffement Planétaire) ou, en anglais, GWP (Global Warming Potential) : de nombreux fluides utilisés dans les systèmes frigorifiques sont des gaz à effet de serre, souvent très puissants. La valeur de PRG permet de comparer leur pouvoir de réchauffement à celui du CO2 qui est pris comme référence. A titre d’exemple, le R134a possède un PRG de 1430. Cela signifie qu’un kilogramme de R134a relâché dans l’atmosphère aura le même impact sur l’effet de serre que 1430 kilogrammes de CO2. Autres exemples, le PRG du R404A est de 3922, celui du R290 de 4, celui du R1234yf de 4, et celui du R717 de 0 et celui du R744 de 1 (normal, non ?).

TEWI (Total Equivalent Warming Impact) : c’est un indicateur qui vise à caractériser l’impact sur le réchauffement planétaire d’une installation (et non seulement d’un fluide) en intégrant les émissions directes, dues aux fuites de fluide frigorigène, et les émissions indirectes, liées à la consommation d’énergie sur la durée de vie l’installation.

Liés aux autres effets sur l’environnement : 

ODP (Ozone Depletion Potentiel) :  apparu dans le courant des années 1980, cette métrique quantifie les dégradations que peuvent causer les composés chimiques à la couche d’ozone. Elle prend pour référence le R11, qui a donc un ODP de 1. Depuis le protocole de Montréal, les restrictions d’usage des fluides ayant un ODP non nul se sont fortement accrues, si bien que les fluides actuels ont tous un ODP de zéro.

Dangerosité pour le milieu naturel : cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant, la dangerosité pour le milieu naturel du fluide est également à prendre en compte. Les substances dont la fuite dans l’environnement est problématique vont générer des risques et des contraintes plus importants. Il est donc important de s’assurer de l’absence d’alternative et de faire les choix en connaissance de cause.

bien choisir un Fluide frigorigène

Les critères thermodynamiques :

Le choix des paramètres thermodynamique du fluide de travail est central dans le développement d’un produit, et il est éminemment lié à l’application. Ce sont principalement ces paramètres qui vont déterminer le fonctionnement de la machine, en particulier son efficacité énergétique et sa plage d’utilisation.

Diagramme de changement d’état liquide/vapeur : c’est sans doute le premier élément à étudier. Chaque fluide est caractérisé par un diagramme de changement d’état. En thermodynamique, on utilise le plus souvent celui de Mollier. C’est un outil très puissant et très pratique puisqu’il va donner accès :

    • aux pressions de fonctionnement pour des températures de source données
    • au taux de compression, qui est le facteur numéro 1 pour le rendement d’un compresseur
    • à la température d’ébullition à pression atmosphérique, qui est un déterminant du risque de dépression dans le système
    • à la température critique
    • au point triple

En fonction de l’application, et en particulier des températures de sources chaudes et froides, il va permettre de déterminer les températures et pressions d’évaporation et de condensation. Il va également permettre d’apprécier certains facteurs d’efficacité énergétique et de vérifier si le cycle envisagé est subcritique ou transcritique, c’est-à-dire si le cycle passe au-dessous ou au-dessus de la température critique.

Puissance volumétrique : c’est la puissance frigorifique qui pourra passer pour un même débit volumique de fluide. Elle influe donc directement sur la compacité (donc le coût « matière ») du système.

Echauffement à la compression : dans un cycle à compression de vapeur, cette donnée peut être importante en fonction de l’application. Elle va notamment jouer sur la température du compresseur, avec le risque de le sortir de sa plage de fonctionnement normale. Sur des applications en chauffage, cela peut-être un atout, mais pas forcément.

Glissement : c’est une caractéristique de certains fluides, qui sont composés d’un mélange de différents composants, qui n’ont pas tous les mêmes points de changement d’état. On parle de mélange zéotrope ou non azéotrope. Avec un tel fluide, le changement d’état ne se fait pas à température fixe, ce qui a une incidence sur le fonctionnement de tous les composants, sur le taux de compression donc le rendement… A étudier avec soin lors du dimensionnement donc.

La règlementation  :

De nombreuses réglementations peuvent impacter la conception d’un système frigorifique et en particulier le choix du fluide.

La F-GAS, de son nom complet « Règlement n° 517/2014 du parlement européen relatif aux gaz à effet de serre fluorés ». Elle introduit :

  • des obligations de contrôle d’étanchéité des installations,
  • des interdictions d’utilisation de certains fluides
  • des interdictions de mise sur le marché d’équipement fonctionnant avec certaines catégories de fluides
  • un mécanisme de réduction – drastique – des quotas de fluides mis sur le marché.

 

C’est LA règlementation à laquelle on DOIT penser en premier quand on se penche sur la conception d’un produit ou d’une installation pour le marché européen. Des discussions sont en cours dans le cadre de sa révision, et tout laisse à penser, à ce stade, que les contraintes vont largement se durcir.

Pour plus de détails, consultez notre article sur les parties du texte qui sont entrées en vigueur en 2022, en attendant une version plus complète en cours de préparation.

DESP : c’est la Directive sur les Equipements Sous Pression. On peut aussi l’appeler « Directive 2014/68/UE du parlement européen du 15 mai 2014 relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché des équipements sous pression ». Mais c’est plus long… En fonction du fluide, de sa pression et du volume, elle impose des obligations de tenue à des pressions plus ou moins importante, ainsi qu’une qualification période des équipements et un suivi administratif potentiellement important, à la charge du Maître d’Ouvrage. Petite spécificité pour les systèmes frigorifiques, le cahier technique professionnel pour ces applications vient d’être mis à jour.

ICPE : une Installation Classée pour la Protection de l’Environnement est une installation qui présente des risques, et qui, à ce titre, est soumise à une déclaration ou à une autorisation préfectorale. En général, c’est le stockage de produits chimiques dangereux ou de process générant l’émissions d’aérosols qui induit le classement au titre des ICPE. Dans le cas d’installations frigorifiques, ce sont souvent les installations de forte puissance utilisant de du R717 (ammoniac) ou les tours aéroréfrigérantes qui sont à l’origine du classement.

Le règlement de sécurité incendie pour les établissements recevant du public : et en particulier son article CH35 « Production, transport et utilisation du froid » limite de manière importante l’utilisation de fluides inflammables comme réfrigérant dans les ERP (Etablissements Recevant du Public). Cet article est l’objet de nombreuses discussions pour l’assouplir, de sorte à permettre notamment l’application de la F-Gas.

L’EN378 – Systèmes frigorifiques et pompes à chaleur – Exigences de sécurité et d’environnement : oui l’EN378 est une norme et non une règlementation. Mais de nombreuses règlementations (dont celles citées plus haut) y font référence, ce qui la rend incontournable. A étudier avec une grande attention donc !

Les critères de sécurité (biens et personnes) :

Les critères de sécurité sont évidemment très importants dans le choix d’un fluide frigorigène. Ce n’est pas parce qu’un fluide est concerné par l’un de ces critères qu’on ne peut pas l’utiliser. Mais il faudra le prendre en compte dans la conception et la mise en œuvre du système frigorifique. Parmi les critères ayant un impact sur la sécurité des biens et des personnes, on peut citer les trois principaux.

L’inflammabilité : les fluides frigorigènes sont tous classés, selon la norme ISO 817 : 2014, en 4 classes d’inflammabilité, en fonction de leur limite inférieure d’inflammabilité, de leur PCI, et de leur vitesse de flamme. Les classes d’inflammabilité vont de la classe 1 (non inflammable), à la classe 3 (très inflammable). Pour plus de détails, n’hésitez pas à consulter la note complète que nous avons faite sur le sujet.

Toxicité : les fluides sont également classés A (non toxique) ou B (toxique), en fonction de leur toxicité pour l’homme. L’immense majorité des fluides que l’on retrouve dans les applications thermodynamiques sont classés A, à l’exception notable du R717 (l’ammoniac) que l’on retrouve dans de nombreuses applications en industrie, ou de fluides utilisés sur des applications plus confidentielles.

Pressions de fonctionnement : la pression de fonctionnement a un impact sur la sécurité dans le sens où elle augmente les contraintes mécaniques sur les différents organes et les composants de ligne.  Rien d’insurmontable toutefois, quand cela est pris en compte dès la conception du système.

bien choisir un Fluide frigorigène

Les critères technologiques  :

De nombreux autres points sont à prendre en compte lors de la conception et de la fabrication. On peut noter, en vrac :

  • La disponibilité des compresseurs et des composants de ligne (il est par exemple beaucoup plus facile de sourcer un compresseur au R290 aujourd’hui qu’il y a 10 ans)
  • La compatibilité du fluide avec les huiles et les problèmes liés à la miscibilité
  • La compatibilité du fluide avec certains matériaux (métaux, joints)
  • Les pressions de fonctionnement
  • Le prix d’achat du fluide et sa disponibilité

Sans oublier, évidemment, la disponibilité d’opérateurs formés pour l’installation et la maintenance, c’est mieux !

Conclusion

En conclusion, la problématique du choix d’un fluide pour une installation thermodynamique est complexe. Il est important de bien y réfléchir, pour prendre en compte autant que possible les différents paramètres. Sans oublier que tout cela évolue sans cesse. Alors si on vous dit « on fait comme ça depuis 25 ans, on va pas changer maintenant » fuyez ! (et passez nous un coup de fil éventuellement 😉)

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